Quand le féminisme chavire dans les eaux radicales.

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 Ce billet n’a pas été écrit sous une quelconque contrainte et son contenu n’engage que moi, Lilas Goldo, chromosomes XX
(et ta mère et tes sœurs aussi un peu)

A chacune ou presque de mes publications, je dois essuyer une volée de remarques sous forme de commentaires, de mails, de tweets ou de messages persos, plus ou moins cinglants, plus ou moins violents en provenance d’un mouvement qui a salement tendance à vouloir se propager : le féminisme radical ou les éoliennes enragées.
Le flot de leur rancœur est si dense et obtus que j’ai dû vite me résoudre à abandonner l’idée de répondre personnellement à chacune (chacun parfois) sous peine d’y perdre toute mon énergie, mon temps et ma foi en l’humanité. Et je laisse donc courir.
Cependant, la récurrence, pour ne pas dire l’acharnement, de ces « agressions »  martèle inconsciemment mon être et lorsque je me retrouve devant mon ordi, prête à rédiger un billet, je ne peux m’empêcher d’appréhender leurs réactions à venir, je suis frustrée de ne pouvoir y répondre concrètement et je m’en veux de subir sans rien dire ce harcèlement psychologique.
Qui ne dit mot consent.
Plutôt crever.
Ce papier est pour toi, féministe extrémiste, féministe qui s’est clairement égarée en cours de route, féministe mue par la colère qui n’œuvre non pas pour le respect, la dignité et le droit des femmes mais juste contre la bite.

Je refuse de me plier à ce féminisme qui veut m’ordonner comment penser, m’épiler, baiser ou aimer. 

Crois-tu vraiment que je me casse le cul à m’affranchir des diktats patriarcaux pour venir ensuite lamentablement me jeter dans la gueule, toute aussi béante et tranchante, de ton féminisme despotique ? Féminisme qui me réduit continuellement en victime, en petite chose fragile fatalement manipulée par le Grand Méchant Loup et qui refuse de voir en moi autre chose qu’un utérus sur pattes, un être humain à part entière. Féminisme qui tente de ligaturer ma liberté d’expression en brandissant des pseudo-arguments de culpabilisation. Féminisme qui me ridiculise en prétendant parler au nom de toutes les femmes et dont le discours se résume à un rageur « Je veux être calife à la place du calife ! » discours aussi constructif et perspicace qu’un beau caca nerveux sur le tapis du salon. Féminisme qui m’aboie dessus à longueur de vie : « OSEZ LE CLITO ! » « STOP A L’ÉPILATION ! » « TRIPOTEZ-VOUS ! »
Non, désolée mais je ne souhaite pas m’enrôler dans ton armée de petits soldats à ovaires, j’ai d’autres ambitions que celle de devenir ta chair à canon. Encore désolée mais j’ai la prétention de croire que je suis autre chose qu’un agneau à gros seins. Vraiment désolée mais mon vagin ne fait pas de moi, une pâte à modeler dévouée à tes capricieuses convenances.

Je ne dis pas que le sexisme, les atteintes faites aux femmes n’existent pas, juste que tes armes pour tenter d’y remédier sont si grossièrement affûtées qu’elles finissent par se retourner contre toi et la cause même que tu prétends défendre. 

Bien sûr que les abus de la toute puissance masculine existent même que tu en es, féministe toute pleine de fureur, sa preuve irréfutable, sa plaie sanguinolente qu’on ne saurait pas voir. Au risque de fâcher, je vais dire sans détour ce qui me semble entraver une lutte intelligente : bon nombre d’entre vous souffrent visiblement d’une expérience douloureuse, d’un traumatisme, sont ou ont été victimes, d’une façon ou d’une autre, de cette domination patriarcale et réclament une vengeance avant même une réelle égalité des sexes. Ta seule motivation tangible reste la haine. Mais bordel de merde, on ne construit rien de solide avec la haine, la haine est un ciment friable. La haine t’aveugle, te faisant tomber dans un pathétique mimétisme, te faisant prendre ces armes que sont la force et la violence, les tentatives d’intimidation, ces armes qui ne sont rien d’autres que celles utilisées par ceux-là même que tu accuses. Inconsciente, tu détruis à coups de mots lapidaires, rageurs et bornés des années de lutte pertinente, à coups de pioche, tu creuses chaque jour un peu plus, le fossé de la discorde. En instaurant le non-dialogue et ta pensée unique, tu distilles frustration et colère ou les mamelles nourricières de la guerre, tu ne fais qu’attiser les braises déjà brûlantes du sexisme et les femmes en deviennent ton principal dommage collatéral.
La haine n’est qu’un gage de faiblesse. Trop d’affect nuit aux facultés de discernement, il faut cesser de penser avec ses tripes, le féminisme ne doit pas être une psychothérapie personnelle s’il veut être efficace. Le féminisme ne doit pas être impulsif mais réfléchi. Guéris tes blessures avant de vouloir en faire une cause nationale.

 Je veux croire en une complémentarité équitable des sexes et non pas en une dualité puérile, en un rapport de force vain et usant.

Je veux me battre pour une parité homme/femme non pas pour imposer un pouvoir matriarcal.
Je n’ai pas honte de dire que j’ai besoin des hommes. Tout comme eux ont besoin de moi. Voilà pourquoi je refuse ce féminisme qui veut en faire des ennemis. C’est pas d’une guerre qu’on a besoin mais d’un règlement intérieur qui définisse la place de chacun pour une cohabitation juste et équitable.
Tu dois maintenant admettre une chose, une base ; les femmes n’auront jamais de bite, tout comme les hommes n’enfanteront jamais et l’un ne peut aller sans l’autre. C’est comme ça depuis la nuit des temps, tes sanglots longs n’y pourront rien changer.

Et pour ceux qui s’interrogent encore sur la nature du phénomène que j’incrimine, un article qui illustre à merveille les dérives effrayantes de ce féminisme vicié : « Le vagin n’est pas un organe sexuel. (Pas plus que l’anus ou la bouche). »

@LilasGoldo

11 réflexions au sujet de « Quand le féminisme chavire dans les eaux radicales. »

  1. Fort heureusement, le « féminisme pro-sexe » (je crois qu’il s’appelle comme ça) fait entendre aujourd’hui un peu plus sa voix que les extrémistes dont il est question ici (dont il ne s’agit ni de nier l’existence, ni l’activisme). Il y a des extrémistes partout, les « pro-vie », les nationalistes, etc, etc.

    La bonne question, c’est : quelles sont les batailles que l’on peut aujourd’hui engager pour aller vers cette « complémentarité équitable » que tu invoques (j’aime assez bien le terme ; moi-même je me définissais « égalitariste » plutôt que « féministe » et récemment je me suis dit qu « équitariste » serait plus précis mais le mot n’existe pas). Et aussi : comment ?

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  2. J’aurais aimé écrire ce billet étant donné que je pense exactement la même chose. Ces pseudo féministes font mal aux femmes et aux hommes, elles se font aussi beaucoup de mal au passage (mais ça on s’en fout un peu).

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  3. Tu m’ôtes les mots de la bouche Lilas, et je te fais écho avec mon goût pour les hommes et la séduction, mon épilation mensuelle ma palette nude Urban Decay ! Non mais…

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  4. « Complémentarité équitable » dit joliment Lilas Goldo. Et, surtout, une complémentarité enrichissante et fascinante. Si on a de la chance, beaucoup de chance… de savoir l’accepter.

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  5. « le féminisme ne doit pas être une psychothérapie personnelle s’il veut être efficace »
    je crois que tu as parfaitement bien résumé la situation de ce genre de féminismes en une phrase.

    Mais à l’inverse -et ca concerne selon moi la majorité des « féministes », en tout cas celles et ceux avec qui j’ai pu discuter IRL- je trouve qu’il y a une confusion entre la libération sexuelle au sens propre du terme et l’idée qui y est associée maintenant.
    Par exemple, vas demander a une fan lambda de Nicki Minaj ou de Rihanna (donc une jeune fille en pleine formation physique et psychologique, et des stars supposément « girl power », ou qui se vendent comme tel. En tout cas le « modèle sexuel féminin actuel », pour résumer) comment elle envisage les relations hommes-femmes, ou même comment se passe la vie de couple avec son copain et crois moi tu vas déprimer pour la soirée.
    Un autre exemple, les Femen. L’idée aurait pu être sympa mais je te mets au défi de trouver une intervention de femen ou la zouz qui montre ses seins n’est pas particulièrement bonne. Tu trouveras pas. Il faut forcément que la fille qui se montre rentre dans les carcans de la « meuf bonne ».
    Un dernier exemple pour la route, Emma putain de Watson qui représente le féminisme à l’ONU, qui fait un discours mondialement retransmis etc. Emma Watson. Donc le nouveau visage du féminisme. C’est plus Simone de Beauvoir ou Rosa Luxembourg c’est Emma Watson, d’accord? La seule raison pour laquelle elle est restée connue après Harry Potter, c’est parce qu’elle est bonne. Sinon elle fait des pubs de parfums ou des blockbusters de temps en temps. DES PUBS DE PARFUM. Bref.

    Tout ça pour dire que ouais, t’as raison par rapport a ce féminisme extrémiste et pas réfléchi (d’ailleurs j’ai lu l’article en lien a la fin, dingue! trop marrant!); mais en même temps ces meufs, bien que névrosées comme jamais, sont sur un début de piste par rapport a l’espèce de transformation de la femme en marchandise (marchandise au sens vraiment marxiste du terme) que les femmes sont les premières à promouvoir.

    Désolé pour le pavé, mais c’est de la faute de ton article qui m’a donné a réfléchir.

    Bisous bisous,
    Kévin 25 ans

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  6. MERCI KEVIN. BRAVO pour l’acuité et la finesse de votre propos, et votre maturité si impressionnantes. J’aimerais avoir plus d’étudiants comme vous, mais on dirait que la saison n’est pas encore venue 🙂 !

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  7. ah la la…. Attaquer Bourdieu dès le départ, quel faux pas ! en tout cas pour moi, et le reste étant à l’avenant, j’ai lu en diagonal l’article référencé, quelle purge. comme quoi on peut se revendiquer d’une juste cause et écrire beaucoup d’inepties et d’absurdité.

    mais attention à assimiler l’extrême avec le courant principal, majoritaire, de fond et peut-être plus discret.

    Pour faire bouger les consciences, il faut des attitudes radicales, mais tout est une question de momentum ! Nier l’apport du féminisme extrémiste, c’est jouer contre son camp. Il y a encore tant à faire… Il faut simplement prendre la mesure de ce qui va trop loin dans le non-sens et faire revenir le curseur.

    De même, estimer que les féministes soignent leur trauma dans ce combat, c’est une généralisation assez grossière mais après tout pas dénué de vérité. Ne peut-on en dire autant de beaucoup de personnes, que se soit des artistes, des entrepreneurs, des politiques, etc.

    Si Ganghi n’avait pas été discriminé et physiquement battu, serait-il devenu ce grand leader pacifiste ?

    Donc il n’y a, à mon sens, aucun mal à sublimer son trauma dans une lutte pour l’équité.

    Mais force est de constater, si on documente un peu,que cela reste une minorité d’activistes, de féministes. il suffit de prendre une liste des féministes radicales pionnières pour se rendre compte qu’elles ne se réclament d’aucun trauma personnel et que la plupart étaient même assez privilégiées et ont lutté tout autant pour des droits de l’homme.

    Et heureusement ! s’il n’y avait que les traumatisés pour faire bouger les choses, on n’irait pas loin.

    En assimilant les féministes systématiquement (et non épistémologiquement) à des traumatisées hystériques, vous sanctuarisez leur statut de victime tout en cédant aux lieux communs.

    est-ce une réponse utile, légitime, au discours féministe radical qui s’attaque à la féminité ?

    car voilà le problème de l’article que vous pointez du doigt : en énonçant « le vagin n’est pas un organe sexuel » on nie la féminité. et ça, ça fait mal à la femme que je suis. je ne me reconnais absolument pas dans ce féminisme-là.

    j’aurais même envie de dire que ce n’est pas du féminisme. mais c’est un peu plus complexe que ça. historiquement, il y a toujours eu des féministes pour nier la féminité elle-même.

    elles ont toujours été submergées par les vagues de femmes qui ont remis la femme, la féminité et le droit des femmes à la sexualité au coeur du débat.

    en fait, en dénonçant ce discours, vous êtes féministe ! un féminisme raisonné avec un petit grain de folie, de déraison.

    je ne suis pas d’accord avec tout ce que vous écrivez, mais c’est intéressant d’en débattre.

    B

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